Années 40 : Fin de la Seconde Guerre mondiale et retour de la France (1945-1949)

Après le retrait des japonais à la fin de la seconde guerre mondiale, le vice-roi Phetsarath Rattanavongsa à Vientiane maintient l’administration et soutien la validité de l’indépendance déclarée durant l’occupation nippone . Ce qui n’est pas le cas du roi Sisavang Vong à Luang Phabang qui contredit son vice-roi et réaffirme sa fidélité au régime colonial.

Phetsarath Rattavongsa.
Source: The mad Monarchist
“Royal Profile: Prince Phetsarath of Laos”.
En ligne
(consulté le 21 Mars 2021).

Le vice-roi Rattanavongsa arrive tout de même à maintenir un semblant de calme est d’unité au Laos, bien que l’agitation au Vietnam face à la fin de la guerre et la menace du retour des français se fasse ressentir parmi les nombreux vietnamiens présents au Laos.

L’opposition entre le gouvernement et la royauté sur le sort du Laos devient de plus en plus problématique (les américains ayant donné leur soutien à l’indépendance ) si bien que le 14 Septembre, Rattanavongsa forme le gouvernement du « Lao issara » (aussi appelé Royaume du Laos libre). Il se détache ainsi officiellement de la monarchie et demande aux puissances étrangères de reconnaître son gouvernement indépendant.

Le chef du gouvernement entre dès lors en trahison contre son roi, désormais, la France ne pourra plus traiter avec le nouveau gouvernement sans trahir le roi de Luang Phabang.

C’est dans une période de profonde division au sein du pays (régionales, divisions nord/sud, divisions ethniques, idéologiques…) que la France saisit l’occasion pour rétablir sa présence dans la région. Mais le pays européen n’est pas le seul à profiter des dissensions en Indochine pour planter ses racines, le communisme fait également une forte entrée dans la région.

Pendant cette période confuse marquée par une bataille d’influence entre France, Chine et Vietnam que revient le prince Souphanouvong, demi-frère Phetsarath Rattanavongsa. Celui qu’on surnomme “le prince rouge” (Souphanouvong) après une rencontre avec Ho-chi-minh au Vietnam, est appelé par le chef du gouvernement lao Issara (son demi-frère), pour commander les forces militaires. Offre que le prince accepte.

Prince Souphanouvong. Source : Fandom Historica, “Souphanouvong”. En ligne “(consulté le 21 Mars 2021).

Le partenariat permet un rapprochement entre les vietnamiens communistes et les indépendantistes lao. Ho-chi-Minh (figure majeur du communisme vietnamien) conscient du rôle qu’est appelé à jouer le prince Souphanouvong, agira fortement en sa faveur pour lui faire prendre du prestige au Laos et ainsi consolider l’idéologie communiste dans la Région.

Le « prince rouge » fera d’ailleurs un important tour du pays lors de son voyage retour où il prend en popularité et se fait de plus en plus connaître auprès de la population. Il fondera par ailleurs un comité : le « lao-itsala du sud ».

De son côté Phetsarath Rattanavongsa est officiellement destitué par le roi le 10 octobre 1945 pour sa désobéissance.

Ces événements mènent à la création du gouvernement Lao-itsala, fusion des comités lao-itsala du sud de Souphanouvong et du comité indépendantiste de Phetsarath à Vientiane. L’ensemble des forces armées indépendantistes impliquées sont fusionnées en « l’armée de libération et de défense lao » placé sous le commandement du prince Souphanouvong.

Une constitution est alors rédigée, c’est la première écrite intégralement par des lao, elle reconnaît la monarchie et met en place un système démocratique avec une chambre des représentants ainsi qu’un gouvernement. La première administration prendra notamment en compte trois noms fondateurs dans l’histoire moderne du Laos : Souvanna phouma, Souphanouvong et Phetsarah.

Le Lao Issala face au retour de la France

Source : Gold55 “Thaïland and lao issara mouvement”. En ligne (consulté le 21 Mars 2021).

Malgré tout, le jeune gouvernement est confronté à d’importants problèmes économiques ce qui le rend démesurément dépendant à l’aide étrangère. Par ailleurs, le gouvernement n’est officiellement reconnu que par la république démocratique du Vietnam.

La France n’en a cependant pas fini avec l’Indochine, le Général DeGaulle refuse l’indépendance des indochinois en 1945 et envoie un corps expéditionnaire. Commence alors la première Guerre d’Indochine qui opposera l’union française aux différents groupes indépendantistes du Lao, du Vietnam et du Cambodge.

Image de la guerre d’Indochine. Source : Radio Canada (2019) “La Guerre d’Indochine, le violent conflit oublié”. En ligne (consulté le 21 MArs 2021).

Le Laos retombe définitivement dans les mains des français le 24 Avril 1946 lorsque les français reprennent le contrôle de Vientiane et forcent le gouvernement Lao-Itsalas a fuir. Le nord du Laos est repris le 13 mai 1946 par les européens.

La période suivant la reprise du Laos se traduit par une répression sanglante du territoire. Les français arrêtent, torturent et assassinent tout sympathisants à la cause lao-itsala, mais aussi de simples suspects. Le gouvernement indépendantiste de son côté entre en Exil et trouve refuge à Bangkok où ils sont soutenus par les thaïlandais, gouvernés par une administration progressiste depuis leur défaite à la fin de la seconde guerre mondiale. Le gouvernement en fuite est alors à son plus faible, avec une armée de libération et de défense du lao ne comptant pas plus que 80 soldats.

La France remet alors en place un régime centralisé et rétablit au pouvoir le roi Sissavang Vong, resté fidèle aux français.

Roi Sisavang Vong. Source: Wikipedia “Sisavang Vong”. En ligne (consulté le 21 Mars 2020).

L’entrée dans la guerre froide et le changement des rapports internationaux

Cette période marquée par la progression du communisme dans le monde, pousse les États-unis d’Amérique à réagir. Le pays, alors mené par le président Truman, lance la politique de “containment” ou doctrine Truman. Plan ayant comme objectif de limiter l’expansion du communisme dans le monde. Hô chi minh est alors déclaré ennemi public numéro un en Asie du sud-est.

Source : Wikipedia, “Containment” En ligne (consulté le 21 Mars 2021).

En Thaïlande les choses se gâtent dès lors pour le gouvernement lao en exil. Le maréchal Plaek Phibounsongkhram reprend le pouvoir grâce à un coup d’État en 1947 avec l’appui des américains. Il met en place des politiques anticommunistes et chasse le prince Souphanouvong de Bangkok.

Le leader de la Thaïlande est opposé au gouvernement en fuite et reconnaît officiellement le gouvernement royal du Laos en 1949. Le Lao-Itsala n’a d’autre choix que de se dissoudre, à court de soutiens.

Du coté du gouvernement royal, deux figures s’imposent, toutes deux partisanes de la négociation avec les français et  de l’indépendance sous tutelle. Il s’agit du roi Sisavang Vong de Luang Phabang et de Chao Boun-Oum, prince de l’ancienne royauté du Sud Laos.

Prince Chao Boun-Oum Source : Dutch National Archives, The Hague, Fotocollectie Algemeen Nederlands Persbureau (ANEFO), 1945-1989. En ligne (consulté le 21 Mars 2021)

Malgré leur fidélité, les partisans de l’option loyaliste ne sont pas pour un retour aux traitements d’avant-guerre. Ils souhaitent une indépendance plus poussée pour le Laos au sein de l’empire, de plus grands investissements, et un partenariat plus serré avec les lao. Coopérer devient alors une nécessité politique et morale pour la France, d’une part parce que le roi est resté fidèle à l’empire même aux pires moments, d’autre part car les lao refusent de maintenir le statu quo.

D’importants fonds sont investis dans l’éducation, on réduit progressivement le nombre de vietnamiens dans l’administration pour laisser de la place aux lao et un gouvernement royal ainsi qu’une assemblée constituante est mise en place.

Le 11 mars 1947, une nouvelle constitution est mise en place. Le Laos devient alors une monarchie constitutionnelle avec un parlement élu aux suffrages universels Le premier gouvernement est formé par Chao Souvannarath, loyaliste, antijaponais et anti-lao-issara.

L’indépendance du Laos est signée officiellement le 19 Juillet 1949 par une convention générale entre la France, le Laos, le Vietnam et le Cambodge. Le Pays reste dans l’union française mais accède à un statut égal à celui de la France. La souveraineté du pays est reconnue mais restreinte du fait de la guerre d’Indochine.

Néanmoins, dès le début, le gouvernement royal est confronté à plusieurs problèmes qui deviendront majeurs pour le Laos. En cause, les rivalités inter-ethniques et la faiblesse de l’administration.

Sources :

Lévy, Paul (1974). Histoire du Laos. Paris : Presses universitaires de France. 

Souk-aloun, Phou Ngeun (2002). Histoire du Laos Moderne (1930-2000). Paris : L’harmattan.